Il est presque 9h, et les périphériques de Barcelone sont encore embouteillés. À quelques centaines de mètres de là, moutons, chèvres et brebis bêlent gaiement à l'arrivée de leur berger. Daniel Sanchez a 36 ans, il a été recruté il y a un mois pour un projet pilote visant à confier le débroussaillage du parc naturel de Collserola à des ovins :
"Là je sors le troupeau pour qu'il paisse et je suis toute la journée avec. Je pense que ce projet devrait se faire partout et tout le temps. Pour des raisons de durabilité et contre la pollution."
À l'origine de ce projet, l'écologue Ferran Pauné. Il est l'un des seuls spécialistes espagnols du pastoralisme et préconise depuis plus de dix ans l'utilisation des troupeaux d'herbivores pour prévenir les incendies mais aussi améliorer la biodiversité. Finalement c'est la crise sanitaire et les scandales dans les grandes fermes industrielles qui ont convaincu la mairie de Barcelone de tester cette méthode naturelle.
Pour le berger Daniel, plus habitué à des espaces retirés, la cohabitation avec les Barcelonais n'est pas toujours aisée:
"Il faut faire beaucoup de pédagogie. Les gens qui se promènent caressent les chiens ou touchent les brebis, il faut leur expliquer de ne pas toucher les chiens, de maintenir leurs distances avec les animaux, les observer et s'ils ont des questions je leur réponds."
Retour à la ruralité en pleine ville
Finalement les Barcelonais cohabitent plutôt bien avec les brebis. 15.000 d'entre eux vivent à l'intérieur du parc naturel, et ils sont plusieurs dizaines de milliers à la lisière du parc.
Mais au-delà de l'aspect insolite et agréable de ce retour à la ruralité en pleine ville, c'est bien pour son efficacité contre les feux de forêts que le projet a reçu le feu vert de la municipalité. Entre un parc en mauvais état et des conditions aggravées par le changement climatique, les pompiers estiment qu'un incendie pourrait détruire le poumon vert de Barcelone en seulement huit heures. Y réinstaurer des pâturages, c'est mettre en place une prévention efficace selon Ferran Pauné:
"Un mois et demi après son lancement, le projet est déjà un succès. Dès septembre, ils seront deux bergers et plus de 400 bêtes à parcourir le parc, avec un objectif à court terme de sept bergers et 3000 brebis."